Prendre et jeter : éléments d’une gestualité économique du Cynisme

Résumé Les questions de la pauvreté volontaire, de la mendicité, ou encore de la falsification de la monnaie ayant déjà donné lieu à plusieurs études directes, nous nous proposons de les aborder par le biais, jusqu’à présent négligé, des gestes effectués par les Cyniques à l’égard des biens matériels : prendre et jeter. S’élabore, ainsi, une … Continuer la lecture de Prendre et jeter : éléments d’une gestualité économique du Cynisme

L’exigence éthique et la tarification à l’activité à l’hôpital

La difficulté des acteurs de santé à intégrer le critère éthique de l’équité dans leur décision est en partie liée aux émotions déclenchées par la perception sensible des patients. Le souci d’une distribution rationnelle des ressources sanitaires en fonction des besoins de la collectivité n’a pas l’intensité émotionnelle de la compassion. L’intégration progressive de la tarification à l’activité dans les établissements de soin offre l’avantage de relativiser l’influence des émotions spontanées dans la décision médicale. Cependant, elle présente l’inconvénient de favoriser la rentabilité plutôt que l’équité.

Economic Writing on the Pressing Problems of the Day: The Roles of Moral Intuition and Methodological Confusion

On fait souvent appel aux économistes pour aider à adresser les problèmes d’actualité, néanmoins, beaucoup d’économistes semblent être mal à l’aise quand il est question de révéler les jugements de valeur qu’ils apportent à ce travail. Cet essai argumente que deux croyances « traditionnelles » centrales auxquelles les économistes adhèrent implicitement contribuent à ce phénomène. Elles sont, premièrement, que la recherche économique « scientifique » empêche l’engagement éthique et la réflexion et, deuxièmement, que les gens pensent fondamentalement à leur propre intérêt dans toutes leurs transactions économiques.

L’essai argumente que ces « croyances traditionnelles » sont en contradiction avec la pratique scientifique établie (valide) et qu’elles persistent, en grande partie, à cause de préjudices de longue date dans la profession. Le développement historique de ces croyances est explore brièvement, avec référence à l’histoire féministe et la philosophie des sciences. La recherché empirique récente sur l’intuition éthique par des chercheurs tells que le psychologue Jonathan Haidt démontre également que le traitement traditionnel de l’éthique comme étant purement une question de principes rationnels est inadéquat. Ces écrits récents démontrent l’importance incontournable des facteurs sociaux et émotionnels dans le jugement éthique, et la présence inévi- table du jugement éthique même à l’intérieur de la recherche « scientifique ».

La tension entre être concerné par les problèmes qui confrontent le monde, d’un côté, et produire des écrits au sein de la culture courante de la discipline économique dominante, de l’autre, est illustrée par des exemples provenant d’écrits d’économistes qui se concernent pour l’inégalité, la pauvreté, le changement climatique, et les problèmes de prise de décision dans le domaine financier. Les auteurs examinés comprennent Lawrence Summers, Jeffrey Sachs, Sir Nicholas Sern, William Nordhaus, George Loewenstein, et Partha Dasgupta. A cause de compréhensions appauvries de l’intuition et de la méthodologie morales, ces écrits tendent soit à cacher les jugements éthiques implicites sous un voile d’« objectivisme » invalide, soit à s’appuyer excessivement sur des appels moraux axés sur le propre intérêt ou rationalistes. Un tel échec à gérer adéquatement l’intuition morale compromet sérieusement la qualité de la recherche économique. Malheureusement, cet échec a peut-être aussi pour conséquence d’encourager un accroissement de comportements axés sur le propre intérêt dans la population au sens large du terme.

L’essai propose que des améliorations des compréhensions des rôles de la méthodologie et l’intuition morale pourraient mener à des formes de pratique de l’analyse économique qui sont plus responsables, « fortement objectives », et plus utiles pour la politique publique.

Behavioral Paternalism

Un nouveau type de paternalisme s’est développé ces dix dernières années sous l’impulsion de travaux innovateurs de certains économistes comportementaux. Ce nouveau type de paternalisme, que j’appelle ici paternalisme comportemental, s’est popularisé grâce à la théorie du « coup de pouce » de Richard Thaler et Cass Sunstein et remet en question l’idée selon laquelle le paternalisme serait inacceptable dans nos sociétés. L’objet de cet article est d’évaluer sa légitimité morale sans, néanmoins, se limiter à son supposé libertarianisme. Les résultats de mon investigation peuvent se résumer ainsi : bien que le paternalisme comportemental soit généralement reconnu pour son caractère libéral, il ne satisfait pas en fait les conditions de ce que Joel Feinberg nomme le « paternalisme mou ». Néanmoins, il possède des qualités morales sous-estimées par ses partisans. Il résiste d’abord très bien à la critique égalitariste d’Elizabeth Anderson. A la différence des formes traditionnelles de paternalisme, le paternalisme comportemental n’est pas dégradant et n’est pas ostracisant. Le paternalisme comportemental, enfin, peut se targuer d’être véritablement altruiste, à la condition, cependant, d’abandonner les hypothèses principales de Sunstein et Thaler.

La responsabilité sociale des entreprises : un sursaut éthique pour combler un vide juridique ?

Malgré un succès contemporain qui pourrait faire croire à un concept très nouveau en sciences de gestion notamment, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) est un concept apparu dans les années 1950. On peut donc s’interroger sur cette résurgence soudaine d’un concept suscitant des interprétations multiples et quelquefois contradictoires. Notre hypothèse est que la RSE, perçue dans une première dimension fonctionnelle et très actuelle, provient d’une lacune du droit matériel. Cette lacune pourrait également expliquer le glissement de niveau auquel on assiste dans l’évolution historique et conceptuelle de la RSE, saisie dans une deuxième dimension : le besoin de se chercher un fondement, dans l’éthique principalement puis dans la philosophie politique. Or, ce recours ne porte pas nécessairement les fruits espérés. Néanmoins, nous ne souhaitons pas en rester à une approche seulement critique. Partant d’une clarification du concept lui-même et des dimensions impliquées cet article vise à comprendre la résurgence et l’actualité du concept de RSE en mettant en exergue la dimension éthique peu convaincante en l’état mais dont un traitement plus complet permettrait de cerner les dimensions politique et juridique à valoriser.