Aux sources conventionnalistes du discours épistémologique de l’ingénieur économiste Jacques Rueff

Résumé C’est à la filiation que Jacques Rueff entretient avec les conventionnalistes français que cet article est consacré. Son premier écrit académique, Des sciences physiques aux sciences morales (1922) est un ouvrage épistémologique qui prévoit l’unification des sciences physiques et morales à partir d’une méthodologie unique et scientifique tirée des principes conventionnalistes. En effet, Rueff les prolonge … Continuer la lecture de Aux sources conventionnalistes du discours épistémologique de l’ingénieur économiste Jacques Rueff

Liberté et rationalité chez Quesnay

La pensée de Quesnay est paradoxale, d’un côté elle prône la liberté du commerce, de l’autre elle développe une doctrine politique fondée sur le despotisme. Y aurait‑il une discontinuité de la pensée physiocratique où l’économie serait le seul espace de liberté ? Pour Quesnay, la liberté n’est pas l’absence de contraintes, elle est l’occasion d’un calcul et l’expression de la rationalité. On analyse l’origine de ce concept à travers Malebranche, Spinoza, Leibniz et Locke. Le rapport de la liberté à la théorie du droit naturel est analysé pour comprendre la cohérence de la pensée physiocratique. On saisit alors mieux la relation entre liberté et ordre.

D’une convention à une autre : quand la rationalité « performe » le réel

Cet article utilise la notion de convention afin de préciser une condition nécessaire à la performation du monde social. On considère ici que l’influence des théories économiques sur le monde social peut être analysée en termes de traduction de conventions scientifiques en conventions sociales. Une telle perspective nous amène à souligner un élément essentiel d’une telle traduction : pour performer le monde social, une notion théorique doit dans un premier temps prendre une posture empirique. On étudie plus particulièrement l’exemple emblématique de la rationalité économique comme concept central d’un nouveau type de politique publique : l’économie des nudges.

Au fondement de l’altruisme : le lien comme fin

Lorsque l’économie comportementale a voulu s’inspirer des recherches sur l’empathie pour modifier le modèle de l’homo œconomicus en interaction, elle s’est heurtée à l’impossibilité de penser les émotions dans le cadre d’une théorie des préférences sociales toujours ancrée dans la rationalité du modèle individualiste interactionniste de la théorie des jeux. Cette impossibilité est due au fait que la théorie des jeux tout d’abord, puis l’économie comportementale ensuite, n’ont pas voulu remettre en question l’objectif fondamental de l’individu lorsqu’il agit en interaction avec les autres. Or, se pencher sur la question des émotions et de l’empathie émotionnelle en particulier devait amener à remettre en question les ressorts du comportement. Que nous disent en effet les autres sciences du comportement ? Que si la survie de l’organisme est sans doute un objectif fondamental et commun à tous les êtres vivants, ce dernier tire par ailleurs sa spécificité de mécanismes fondamentaux et pré-câblés qui le spécialisent pour la vie en interaction avec ses semblables. Grâce à ces mécanismes fondamentaux l’espèce humaine a pu élaborer des modes de coopération productifs et sociétaux à grande échelle. Nous proposons en conséquence un changement de perspective en économie comportementale qui permettrait de considérer que l’objectif ultime de l’individu en société n’est pas d’assurer sa survie et ses besoins, mais de créer et d’entretenir le lien aux autres.

David Lewis et la rationalité des conventions

Lewis se propose de donner un sens à la notion de convention de langage fondée sur la coordination des activités d’agents rationnels. Mais il doit pour cela utiliser une version de la théorie des jeux de coordination qui exige l’emploi de concepts problématiques comme celui de savoir commun de la rationalité des agents. De ce fait, la liaison qu’il tente d’établir entre convention et rationalité semble à la fois trop forte et trop faible. Deux séries de difficultés opposées surgissent en effet. La première souligne les obstacles à faire de la conformité à une convention de Lewis un comportement purement rationnel. La seconde montre que la convention de Lewis exclut les jeux de coordination dans lesquels la rationalité individuelle conduit à un choix sous-optimal.