Le concept de « marchandise fictive », pierre angulaire de l’institutionnalisme de Karl Polanyi ?

La notion de « marchandise fictive » n’est pas simplement un slogan hétérodoxe commode pour critiquer l’incomplétude radicale de tout système marchand et par-là même les limites analytiques de la théorie dominante. C’est surtout la pierre angulaire de l’édifice institutionnaliste qui sous-tend l’ensemble des analyses socio-historiques de Karl Polanyi. Cet article explicite et articule les deux niveaux de cet édifice : un niveau théorique avec l’approche institutionnaliste de la marchandise et un niveau épistémologique avec la définition substantive de l’économie. Cet édifice comporte néanmoins une limite : la notion d’institution, qui est à la charnière des deux niveaux, n’est articulée à aucune réflexion pratique, de sorte que le potentiel révélateur et critique de cet édifice risque d’en être affaibli.

L’entreprise fait-elle partie de la structure de base rawlsienne ?

Cet article clarifie le statut de l’entreprise par rapport à la structure de base rawlsienne. Ce statut est ambigu, du fait d’incertitudes liées à la conception rawlsienne de l’entreprise ainsi qu’à sa définition de la structure de base. L’article identifie deux représentations principales de l’entreprise chez Rawls : l’une inclusiviste, qui définit l’entreprise comme une entité ontologiquement distincte de la structure de base ; l’autre constitutiviste, qui l’appréhende comme une institution susceptible d’appartenir à la structure de base. L’article recense ensuite différentes interprétations de la structure de base avant d’en proposer une plus large, y intégrant notamment certaines structures informelles. Articulée à la conception institutionnaliste de l’entreprise, cette définition large de la structure de base débouche sur une représentation constitutiviste étendue de l’entreprise, permettant ainsi au libéralisme égalitaire de considérer cette dernière d’un œil plus critique.

Herméneutique et économie. Le valorisé, le valorisant, le valorisable

L’objectif de la présente contribution est de dégager les conditions de possibilités (et les limites) de l’extension du paradigme herméneutique à la science économique. La discussion porte sur le projet épistémologique qui cherche dans les sciences textuelles une matrice susceptible de contrer les prétentions positivistes des économistes néo-classiques. Plutôt que d’expliquer les mécanismes du marché sur le modèle des sciences naturelles pour en dégager des lois propres, il s’agit d’en comprendre le sens sur le modèle d’un texte à interpréter. Le prix à payer de cette extension épistémologique est de sacrifier la part explicative de la science économique et la place des institutions.

L’économie des conventions : une lecture critique à partir de la philosophie pragmatiste de John Dewey

L’économie des conventions a émergé, en France, dans les années 1980, comme un projet de recherche ambitieux qui rejette la conception utilitariste de la rationalité et introduit la référence à la convention, sans en proposer une définition stabilisée. Le travail de clarification des concepts fondamentaux mobilisés par ce courant, qui est entrepris dans cet article, conduit à considérer que ce terme désigne une méthode de recherche. Le chercheur qui ‘fait de l’économie des conventions’ est confronté à la question méthodologique de la présence des institutions dans l’action et à la question politique de l’évaluation et de l’amélioration des dispositifs institutionnels. Cet article entend montrer comment la philosophie pragmatiste de John Dewey aide à répondre à ces questions.