Résumé
Le terme de « travail » est loin d’être univoque en économie, en sociologie comme en philosophie, et la catégorisation d’une activité comme « travail » est l’objet de conflits de valeurs. L’examen des cas du travail domestique et du travail numérique permet de faire émerger un concept de « travail » étendu mais potentiellement consensuel, où le travail est défini comme une relation de commanditaire à commandité.
Début de l’article
La définition du concept de « travail » est au cœur de nombreux débats philosophiques, politiques et militants contemporains dont les conséquences pratiques pourraient être d’importance. Selon qu’on veuille en augmenter ou en réduire la place dans nos vies, en dénoncer le non-sens et les conséquences socio-environnementales néfastes ou en souligner la nécessité et la centralité, et en promouvoir des formes plutôt auto-entreprenariales, salariales, fonctionnarisées ou démarchandisées, on en discute différemment les propriétés et modalités intensionnelles ; et on en subdivise diversement les types (agréable/désagréable, utile/inutile, sensé/insensé, bon/mauvais, vrai/faux), dans une démarche définitionnelle extensionnelle, pour inclure ou exclure les activités qui permettront de le valoriser ou de le dévaloriser.
Dans le même temps, on valorise ou dévalorise des activités humaines (voire des activités et des entités naturelles) en les qualifiant de « travail » ou en leur refusant ce nom. Dans la vie quotidienne, il est devenu courant d’user du terme pour désigner l’apprentissage, l’exercice, l’occupation ou l’œuvre. Dans divers champs théoriques et militants, les débats sur l’extension du concept au travail domestique, socio-émotionnel, reproductif, mais aussi au travail digital affectif, au travail social en réseau ou à la production de valeur par la simple émission de datas en ligne, touchent à la reconnaissance qu’impliquerait la mise en lumière du travail invisibilisé