Résumé
Toute nation participant à la division internationale du travail retire nécessairement un gain économique supérieur à une situation d’autarcie. C’est le message fondamental, normatif, de toutes les écoles théoriques ayant œuvré à la compréhension des fondements de l’échange entre les pays. Le protectionnisme est par conséquent très souvent vilipendé par les économistes qui y voient un frein à la circulation internationale des biens et des services, bloquant ainsi la croissance, l’emploi et l’élévation des niveaux de vie. Le questionnement actuel portant sur les gains que les nations et les populations ont réellement retiré de la mondialisation, sur les inégalités que cette mondialisation aurait occasionnées, suggèrent de rouvrir l’œuvre de Johann Gottlieb Fichte, qui, pour avoir été présent dans certaines écoles de pensée économique, est aujourd’hui totalement absent. Dans L’État commercial fermé, il adresse en effet une critique virulente aux économistes qui, soit prônent le libre-échange, soit le protectionnisme. Fichte estimait que les avancées de la métaphysique devaient être appliquées à la vie réelle. C’est pourquoi son ouvrage contient l’une des premières doctrines du socialisme d’État. La situation présente de la mondialisation peut redonner du lustre à une approche aujourd’hui oubliée des économistes.
Début de l’article
Combiné avec la Chute du Mur de Berlin, le processus de mondialisation des économies était annonciateur d’une élévation de la richesse mondiale, porteuse d’augmentation des niveaux de vie, et, surtout, d’une pacification des relations internationales, sous l’angle à la fois diplomatiques, militaires et commerciales. Chacun se souviendra de la perspective qui s’offrait alors aux nations dans leur ensemble, celle de la « fin de l’histoire », ainsi que le prédisait, de manière sans doute hâtive, le politologue américain, Francis Fukuyama (1992). L’état présent des relations internationales suggère de se déprendre de toutes ces projections naïves. En réalité, la mondialisation apparaît pour ce qu’elle est, ambivalente à plus d’un titre. Que la mondialisation ait permis de s’affranchir de barrières multiples pour faciliter la circulation des hommes, des marchandises et des capitaux, l’actualité nous le prouve quotidiennement en dépit de ses défauts, de ses incomplétudes.
La montée des inégalités, la recrudescence du nombre de personnes sous-alimentées dans le monde après des décennies de baisse, l’incapacité depuis sa création en 1995 d’une institution internationale comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de conclure le cycle multilatéral du développement lancé à Doha en novembre 2001, les tentations néo-nationalistes dans les pays de l’Est européen, dont certains sont pourtant membres de l’Union européenne, débouchant sur Europe devenue un espace de concurrence et de libre-échange plutôt qu’une véritable communauté où chacun adhère à des valeurs communes…
Plan
- 1. L’incursion du philosophe dans le champ de la science économique
- 1.1. Un livre dans son contexte
- 1.2. Le libre-Échange, c’est la guerre
- 2. La pensée économique de Fichte en résonance avec l’état présent du monde
- 2.1. Coopération versus conflictualité : le temps présent de la mondialisation
- 2.2. Fichte, la souveraineté totale et l’alimentation
- 2.3. L’agriculture et l’alimentation : de convoitises, de guerres commerciales, en fermeture potentielle
- Conclusion
Mots-clés
Codes JEL : B1, B14, B17, B31, F51.