
Jean-Fabien Spitz, La propriété de soi. Essai sur le sens de la liberté individuelle, Vrin, 2018, 240 p.
Début de la recension
Le fait de s’appartenir soi-même est au cœur de la notion d’individu. Jean-Fabien Spitz tente de repenser le concept de propriété de soi, trop souvent interprété de manière radicalement anti-sociale par les libertariens de droite, à l’image de Robert Nozick dans Anarchy, State and Utopia (1974). Selon les libertariens, les individus sont propriétaires de leur propre personne, mais aussi de l’ensemble des revenus et des choses qu’ils tirent de leurs attributs et facultés personnels. Un individu particulièrement favorisé par le hasard ne serait donc pas tenu de contribuer, notamment par le biais de l’impôt redistributif, au bien-être de ses concitoyens moins chanceux. Contre ce raisonnement individualiste, J.-F. Spitz entend montrer que le droit de chacun sur sa propre personne comprend le respect des droits des tiers à l’autonomie.
Loin d’être un droit naturel, la propriété est une convention sociale, soumise à un débat moral et politique. L’auteur reconnaît que cette conception de la propriété n’est pas neuve, et cite, parmi ses premiers défenseurs, le philosophe britannique John Stuart Mill. Dès le XIXème siècle, Mill remettait en cause le caractère absolu et figé de la propriété, tel qu’il a pu être théorisé par les révolutionnaires français. En même temps, cette culture juridique est à l’origine de nombreux textes mais aussi d’une manière d’appréhender le monde. Dans sa tentative de repenser la propriété de soi, J.-F. Spitz se heurte à la différenciation très forte entre le statut de l’individu et celui des choses…