Résumé
L’expression actuelle « aplatir la courbe » présente des similitudes avec la politique macroéconomique du milieu du xxe siècle, que l’on peut à juste titre qualifier de « phénomène macroscopique ». Dans la mesure où ces similitudes existent, l’analyse historique-épistémologique de ce type de politique macroéconomique peut nous permettre de mieux comprendre les conditions préalables à l’efficacité de la politique actuelle d’aplatissement de la courbe COVID-19. La mesure politique formulée en termes de modelage d’un phénomène suppose que le phénomène en question existe et qu’il ait une certaine forme qui peut être modelée. Ce modelage, cependant, n’est pas supposé être effectué directement sur la forme elle-même, mais sur le mécanisme qui génère cette forme, et qui est également supposé exister. Par conséquent, la condition préalable à ce type de mesure politique est de connaître le mécanisme à l’œuvre. La connaissance du type d’intervention requise pour modifier la forme dans une direction souhaitée, cette connaissance du mécanisme, est supposée être saisie par un modèle mathématique sur lequel plusieurs mesures politiques peuvent être testées pour voir laquelle conduit à la forme souhaitée.
La politique macro-économique du milieu du xxe siècle visait à façonner le cycle économique, et était donc fondée sur la croyance en l’existence d’un mécanisme de cycle économique. Avec la perte de la croyance en l’existence d’un tel mécanisme, les mesures politiques visant à façonner le cycle économique ont également disparu. Cet article retrace cette histoire et montre comment cette politique basée sur un raisonnement mécanique, qui trouve son origine dans les sciences naturelles, a été progressivement remplacée par une approche qui prend en compte les aspects non naturels du comportement humain.
Mots-clefs
Cycle économique ; Aplatir la courbe ; Macroéconomie ; Analogie mathématique ; Raisonnement mécanique