From gross misconduct to responsible behaviour. A dream that necessitates realisticness

Les discours sur le développement durable auront peu de substance, tant qu’ils ne seront pas accompagnés d’une notion de responsabilité, qui elle est reliée à la durabilité, où encore à la soutenabilité. Cet article est motivé par des circonstances tant géopolitiques qu’économiques calamiteuses, en terme de gouvernance, et de manière plus générale, par la prolifération de pratiques que l’on qualifiera ni de soutenables, ni de responsables. En conséquence, j’ai pour but l’élaboration d’une conception de la responsabilité, elle ancrée et robuste. Dans ce projet, je m’efforcerai d’identifier tout particulièrement les conditions nécessaires pour un tendre vers un comportement responsable, capable de soutenir un développement dit durable en pratique, aussi bien qu’en théorie.

A new style of development to deal with the current crisis: solidarity-based economy, collective capability and sustainable human development

Pour éviter une aggravation de la crise actuelle, comme l’apparition de nouvelles crises liées aux contraintes écologiques et inégalités socio-économiques, il devient indispensable de repenser les modes de fonctionnement des agents, les structures de pouvoir et les processus décisionnels. On peut ainsi aider à l’émergence d’un autre style de développement, d’autant plus que certains de ses constituants sont déjà à l’œuvre. Le premier, d’ordre théorique, porte sur l’approche par les capacités qui met l’accent sur les capacités d’action, effectives et potentielles, des agents, leurs libertés à choisir ce qui importe et à agir collectivement dans ce but. Le deuxième, plus opérationnel, concerne l’économie solidaire qui se réfère aux valeurs de responsabilité, d’équité et de reconnaissance pour surmonter les problèmes écologiques et sociaux actuels, en modifiant les manières d’agir et d’être des agents. Le troisième porte sur le développement durable (ou soutenable), lequel, à travers ses dimensions humaines (renforcement des capacités) et sociales (équité intra et intergénérationnelle, lutte contre la pauvreté et les inégalités, prise en compte de la vulnérabilité et de l’exclusion), offre le cadre explicatif le plus englobant. Examiner comment ces trois constituants peuvent s’articuler pour engendrer un autre style de développement est le but de cet article.

La responsabilité sociale des entreprises : un sursaut éthique pour combler un vide juridique ?

Malgré un succès contemporain qui pourrait faire croire à un concept très nouveau en sciences de gestion notamment, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) est un concept apparu dans les années 1950. On peut donc s’interroger sur cette résurgence soudaine d’un concept suscitant des interprétations multiples et quelquefois contradictoires. Notre hypothèse est que la RSE, perçue dans une première dimension fonctionnelle et très actuelle, provient d’une lacune du droit matériel. Cette lacune pourrait également expliquer le glissement de niveau auquel on assiste dans l’évolution historique et conceptuelle de la RSE, saisie dans une deuxième dimension : le besoin de se chercher un fondement, dans l’éthique principalement puis dans la philosophie politique. Or, ce recours ne porte pas nécessairement les fruits espérés. Néanmoins, nous ne souhaitons pas en rester à une approche seulement critique. Partant d’une clarification du concept lui-même et des dimensions impliquées cet article vise à comprendre la résurgence et l’actualité du concept de RSE en mettant en exergue la dimension éthique peu convaincante en l’état mais dont un traitement plus complet permettrait de cerner les dimensions politique et juridique à valoriser.

Entre l’homme obligé et l’homme capable : la responsabilité de l’entrepreneur social. Eléments de réflexion philosophique

L’entreprenariat social nous engage dans deux formes de responsabilité, l’une obligataire, qui ressortit au registre juridique et moral, l’autre mondaine ou cosmologique, qui ressortit au registre de l’action et de la création. La pratique entrepreneuriale en tant que telle honore prioritairement la responsabilité cosmologique, tandis que la dimension sociale de cette pratique réfère, quant à elle, au caractère obligataire. Dans cet article, nous proposons de revenir sur la généalogie de ces deux acceptions fondamentales de la responsabilité, qui ont trouvé dans le kantisme à la fois leur lieu de formulation philosophique et leur point de bifurcation, mais aussi de dégager la portée et les limites de leur dialectisation dans l’activité sociale-entrepreneuriale aujourd’hui. Nous montrons que la première convoque en son sein plusieurs traditions de philosophie morale impliquant différentes extensions du concept, ce qui oblige à nous interroger sur sa propre opérabilité. La seconde, que nous aurons à cœur d’illustrer en rapportant certains discours d’entrepreneurs, a été davantage honorée à l’époque contemporaine par les approches phénoménologiques et de philosophie de l’action de tendance analytique. Nous terminons en envisageant la possibilité pour l’entrepreneur social de s’extraire de cet atermoiement entre deux formes de responsabilité dans le contexte actuel, naguère anticipé par Hans Jonas et dont témoignent aujourd’hui le succès des thèmes de l’écologie politique et du développement durable, opérant ainsi un renversement du rapport de l’action humaine à la peur de l’avenir – peur à laquelle s’est substituée au fil du temps la projection raisonnée d’un futur malheureux, toutes choses égales ailleurs.

A.K. Sen et J.E. Roemer : une même approche de la responsabilité ?

L’objet de cet article est d’examiner comment A.K. Sen et J.E. Roemer envisagent la responsabilité par le biais de leur théorie (Equality of Opportunity principle de Roemer et capabilité de Sen). L’analyse comparative de ces approches est justifiée par la position atypique que Roemer exprime sur la capabilité. Une brève revue des théories modernes de la justice est nécessaire pour mesurer les enjeux soulevés par le traitement de la responsabilité et pour réaliser pleinement en quoi la position de Roemer est sujette à examen. Ces considérations mènent à une comparaison approfondie des deux théories.