Behavioral Paternalism

Un nouveau type de paternalisme s’est développé ces dix dernières années sous l’impulsion de travaux innovateurs de certains économistes comportementaux. Ce nouveau type de paternalisme, que j’appelle ici paternalisme comportemental, s’est popularisé grâce à la théorie du « coup de pouce » de Richard Thaler et Cass Sunstein et remet en question l’idée selon laquelle le paternalisme serait inacceptable dans nos sociétés. L’objet de cet article est d’évaluer sa légitimité morale sans, néanmoins, se limiter à son supposé libertarianisme. Les résultats de mon investigation peuvent se résumer ainsi : bien que le paternalisme comportemental soit généralement reconnu pour son caractère libéral, il ne satisfait pas en fait les conditions de ce que Joel Feinberg nomme le « paternalisme mou ». Néanmoins, il possède des qualités morales sous-estimées par ses partisans. Il résiste d’abord très bien à la critique égalitariste d’Elizabeth Anderson. A la différence des formes traditionnelles de paternalisme, le paternalisme comportemental n’est pas dégradant et n’est pas ostracisant. Le paternalisme comportemental, enfin, peut se targuer d’être véritablement altruiste, à la condition, cependant, d’abandonner les hypothèses principales de Sunstein et Thaler.