Herméneutique et économie. Le valorisé, le valorisant, le valorisable

L’objectif de la présente contribution est de dégager les conditions de possibilités (et les limites) de l’extension du paradigme herméneutique à la science économique. La discussion porte sur le projet épistémologique qui cherche dans les sciences textuelles une matrice susceptible de contrer les prétentions positivistes des économistes néo-classiques. Plutôt que d’expliquer les mécanismes du marché sur le modèle des sciences naturelles pour en dégager des lois propres, il s’agit d’en comprendre le sens sur le modèle d’un texte à interpréter. Le prix à payer de cette extension épistémologique est de sacrifier la part explicative de la science économique et la place des institutions.

La question du bonheur : L’éthique de la joie, Robert Misrahi

Les philosophes n’accordent plus guère aujourd’hui à la question du bonheur toute l’attention qu’elle mérite sauf pour dire qu’elle n’a aucun intérêt et ce terme n’appartient plus au vocabulaire des économistes qui lui préfèrent celui de bien-être qu’ils considèrent moins chargé métaphysiquement. Pourtant la disparition de cette question semble être largement liée à la diffusion d’une anthropologie philosophique particulière que rien ne semble pourtant imposer d’évidence. Les philosophes et les économistes conçoivent les individus comme des êtres mus par un désir qu’ils définissent, à la suite de Platon, comme un manque à combler. Se faisant, ils ne pouvaient que déboucher, comme l’avait bien vu Hobbes et Pascal, sur un pessimisme philosophique et une éthique minimaliste. En définissant le désir comme puissance, et non plus comme espérance, Misrahi, à la suite d’Aristote et Spinoza, insuffle un nouvel élan à la philosophie morale qui débouche sur une éthique de la joie praticable. Cet article veut montrer l’importance que devrait avoir l’œuvre de Robert Misrahi pour l’économiste lorsqu’il abandonne ses domaines traditionnels d’investigation pour s’intéresser aux problèmes normatifs et plus particulièrement d’éthique. Pour cela, dans une longue introduction, l’œuvre de Misrahi est replacée dans son contexte intellectuel. Puis, dans une première section, sont étudiés les origines, les fondements et la méthode de son éthique de la joie. Enfin, dans une seconde section, est dénoncée la thèse de la double transparence qui l’imprègne sans que pour autant elle en obère les gains potentiels.

Les sources du moi. La formation de l’identité moderne, Charles Taylor

Partant de l’exposé de la démarche herméneutique sous-jacente à l’œuvre de Charles Taylor, nous nous proposons de suivre le fil de son argumentation dans Les sources du moi. L’article présent tend à montrer en quoi la lecture de cet ouvrage est essentielle à l’économiste. Elle peut en effet l’amener à questionner, voire limiter, la portée des outils d’investigation qu’il utilise traditionnellement dès lors qu’il s’intéresse aux problèmes de justice sociale.